#WUD Bordeaux 2015 : L’innovation au cœur de l’utilisabilité avec Thalès et CDiscount
J’ai récemment quitté Paris pour m’installer à Bordeaux et je suis ravie de constater que la communauté de professionnels de l’UX y est très active. L’association Flupa possède en effet une antenne bordelaise et c’est à son initiative que le World Usability Day a été organisé. Puisqu’il s’agit d’un événement mondial dont l’édition 2015 devait traiter de l’innovation, des représentants des plus grosses entreprises locales se sont relayées au micro : JP Nicolas pour CDiscount et Sylvain Hourlier pour Thales. Ils nous ont offert un partage d’expérience riche d’enseignements sur la manière dont leur travail sur l’utilisabilité a permis d’innover vis à vis de leur concurrent.
Cdiscount ou comment faire du moche efficace
J’étais très curieuse d’écouter l’intervention de J.P Nicolas à propos des interfaces CDiscount. Il faut dire qu’elles ne se démarquent pas par leur esthétisme et en même temps, je me doute bien que Cdiscount n’est pas devenu le n°1 de l’e-commerce français par hasard.
Au fil de la conférence, j’ai compris que la force de frappe de l’entreprise était sa méthode de conception éclair et rationnelle qu’elle a baptisée « l’optimisation continue » (web analytics > expertise > tests utilisateurs > Développement > Test AB). Pour distancer ses concurrents, le géant du discount online n’hésite pas à faire preuve de réactivité en mettant en ligne des interfaces en des temps records, quitte à ce qu’elles soient imparfaites. Il consacre ensuite un budget conséquent pour les améliorer au fil de l’eau sur la base d’AB Testing à échelle 1. C’est comme ça qu’en 2011, Cdiscount s’est attelé au chantier du mobile pour être le premier à mettre à disposition des applications mobiles et tablettes. Une technique efficace qui paie !
Quant à l’esthétisme de l’interface, elle sert à la fois un ADN et des objectifs de conversion. Et force est de constater qu’après les tests utilisateurs exécutés, les écrans surchargés avec des pubs qui clignotent vendent mieux, dans le cas précis de Cdiscount, qu’un bel écran épuré qui offrirait un parcours direct jusqu’à l’achat. Nous l’aurons compris, il faut parfois s’asseoir sur les idées reçues où les grands principes de l’UX car ces derniers ne constituent pas toujours la meilleure réponse selon les enjeux, ici, la conversion visite/vente. Et il est une chose qui ne ment jamais en UX, ce sont les tests utilisateurs.
Résoudre la surcharge cognitive en misant sur l’IHM : le défi de Thales
S’il est un domaine que je connaissais peu il y a encore quelques mois, c’est bien le facteur humain. Il est pourtant connecté de très près à l’UX design. Prenons pour exemple un pilote en vol : la complexité du monitoring auquel il est contraint représente une telle charge cognitive en situation normale qu’il est complètement dépassé lorsqu’un événement imprévu se produit. C’est une des raisons qui peu conduire au crash (je vous invite à lire cet article à ce propos). Pour compenser cette surcharge cognitive, la solution privilégiée aujourd’hui est la formation du pilote aux situations exceptionnelles. Sylvain Hourlier a expliqué durant son intervention comment Thales avait œuvré sur son dernier cockpit, l’Avionics 2020, pour réduire la charge cognitive via un travail sur l’IHM en misant principalement sur 4 leviers :
- la capitalisation sur la routine,
- la délégation,
- l’usage de schémas mentaux,
- l’anticipation.
L’idée sur cette IHM était aussi de respecter les limites de l’humain, tant physiques que cognitives, pour éviter sa frustration et les déviances d’usage qui en découlent. Car l’Humain fonctionne sur le principe de l’économie : il va toujours essayer de simplifier l’action à exécuter, quitte à se détourner un objet de sa fonction initiale si ça peut l’aider.
A voir la différence entre l’IHM (presque) full tactile de Thales et un cockpit traditionnel d’avion commercial, on remarque un effort notable d’épure. Je ne suis pas pilote, difficile pour moi d’évaluer l’efficience de cette solution, mais un travail sur l’IHM en complément des entraînements me semble logique et souhaitable.
Si l’on compare les cockpits à l’évolution des téléphones mobiles, nous nous situons peut être ici à un point de rupture technologique déterminant (comme celui qui est peut être en train d’intervenir entre le smartphone et la smartwatch ?). L’avenir nous le dira.